Manchuria Opium Squad de SHIKAKO et Tsukasa MONMA

Fiche

  • Titre : Manchuria Opium Squad
  • Auteur : Shikako (Dessin) / Tsukasa MONMA (Scénario)
  • Editeur : Vega Dupuis
  • Date de publication française : 7 janvier 2022
  • Type : Seinen
  • Genre : Drame / Historique
  • Nb de volumes parus : 1 (en cours de parution)

Résumé

Jeune agriculteur en Manchourie, Isamu Higata voit son quotidien bouleversé lorsque la peste finit par toucher sa mère… Pour gagner l’argent nécessaire à son traitement, il se lance dans la culture du pavot et réussit à purifier de l’opium. Mais ce faisant, il tombe dans le monde des mafias ce qui va le plonger en enfer.

Mon avis

Et voila, 2022 c’est parti et avec lui la valse des sorties démarre. Une des premières sorties de l’année que j’attendais pointe le bout de son nez et ce n’est autre que Manchuria Opium Squad! Accroché dès l’annonce du titre par les quelques visuels que j’avais pu voir et par le contexte historique dans lequel le titre se déroule il est temps.

Sortie au Japon en 2020 dans lequel il a déjà 6 volumes à son actif, Manchuria Opium Squad débarque donc en France en ce début 2022 chez Vega-Dupuis. Un titre à 4 mains puisqu’il est le fruit de la collaboration entre Tsukasa Minma au scénario et Shikako au dessin. Si le nom de ce dernier ne vous dit peut être rien ce n’est pourtant pas sa première série chez nous. En effet c’est sous un autre nom que nous l’avons déjà vu aux commandes de la série rugbystique Full Drum chez Pika mais il était cette fois là au dessin et au scénario.

Comme le titre le laisse à penser le manga prend place en Manchourie dans le contexte particulier des années 30. Une époque où le Japon, animé par une volonté expansionniste(et qui se rapprochera de l’Allemagne par la suite) livre une guerre à la Chine et s’impose peu à peu en Manchourie. On y fait la rencontre d’Isamu Higata qui vient d’être réquisitionné pour partir sur le front en lieu et place de son père décédé. Beaucoup trop tendre pour participer à cette guerre, il sera blessé et deviendra rapidement ce qu’on appelle un guerrier de la houe. A l’époque des japonais avaient été envoyé en Manchourie pour cultiver des terres sur place dans le but de nourrir les armées. En amoureux de la terre qu’il est (son encyclopédie de botanique le suivant partout), il trouve son compte dans ce nouveau poste qu’il occupe et lui permettant de vivre et travailler avec sa mère, frère et sœur. Un mal pour un bien en quelque sorte. Mais c’était sans compter sur sa mère qui va contracter rapidement la peste obligeant ainsi le garçon à se démener pour trouver l’argent nécessaire pour pouvoir la soigner. Alors qu’on lui propose sympathiquement d’acheter son frère et sa sœur (pour pièce sinon c’est pas drôle), son attrait et ses connaissances en botanique, associés à la découverte d’un champ de pavot par hasard, font que l’idée est toute trouvée : il va fabriquer de l’opium ! Et si cela lui semble plus sûr que de récolter quelques piécettes contre les yeux ou d’autres organes de sa fraterie il va vite se retrouver à devoir manigancer avec des puissances plus que dangereuses. Entre la pègre chinoise et la gestapo japonaise, notre jeune chimiste de génie va devoir redoubler de vigilance !

Voilà donc pour le petit tour d’horizon rapide de ce premier volume que j’ai dévoré. Cru, dur, violent, ce premier tome pose les bases de l’univers dans lequel va évoluer notre protagoniste. Totalement en phase avec le contexte politique qui oppose chinois et japonais, les relations sont tendues entre les personnes des 2 nations. Et le cador de l’opium va vite l’apprendre à ses dépens, tout d’abord au front en voulant aider des enfants puis ensuite lorsqu’il démarrera son petit business, où le fait qu’un japonais commence à vendre de l’opium pose forcément des problèmes à la société secrète chinoise qui a la main mise sur ce petit commerce. Mais aussi aux japonais car oui, non content de tenter d’accroitre leur territoire au détriment du peuple chinois, ils ont commencé d’immense culture de pavot pour eux aussi toucher le pactole avec l’opium.

Si le titre va mettre en scène un duo atypique entre le jeune chimiste japonais et la personne qui trouvera les clients (je vous laisse découvrir), ne vous attendez à retrouver un breaking bad bis, le ton volontiers drôle ou léger des débuts de la série à succès n’est pas au rendez vous de ce premier tome de Manchuria Opium Squad. Et dans un sens tant mieux ça m’aurait personnellement fait sortir du titre. Ici c’est dur, c’est violent, c’est sale comme je l’ai déjà dit, laissez derrière vous les fumeurs d’opium raffinés et les fumeries tout aussi propres et joliment décorées. Place au corps squelettiques, aux bouches édentées, aux visages déformés par l’addiction et les bad-trips d’une drogue qui leur arrache leur humanité. Et le trait du mangaka et en particulier son travail sur les visages fait des merveilles dans ce premier volume, on a l’impression de pouvoir sentir l’haleine infecte de ces humains plus proche des morts que des vivants, de les sentir presque tenter de nous accrocher pour nous embarquer dans leur folie. Bref le tout semble parfaitement maîtrisé et nous immerge un peu plus dans ce récit.

Avec un premier volume qui pose les bases d’un univers sombre et dans lequel la course au contrôle du trafic d’opium et du Mandchoukouo ne fait que démarrer. Nul doute que les bonnes intentions du début seront à un moment ou à un autre derrière notre protagoniste qui aura semble t’il déjà beaucoup à faire dans le prochain volume! De mon côté j’ai été bien accroché par ce premier tome qui correspond aux attentes que j’avais et j’ai déjà hâte de lire la suite.

Sahara, le samouraï aux fleurs de Yusaku Shibata

Fiche

  • Titre : Sahara, le samouraï aux fleurs
  • Auteur : Yûsaku SHIBATA
  • Editeur : Nobi-Nobi
  • Date de publication française : 3 Février 2021
  • Type : Shonen
  • Genre : Aventure/Action
  • Nb de volumes parus : 1

Résumé

Dans un monde où la terre s’est recouverte de sable, un samouraï atypique du nom de Sahara erre seul.
Il affronte les nombreux guerriers mécaniques qui rôdent hors des villes avec une étrange épée qui peut prendre la forme de différentes fleurs et plantes. Un jour, il rencontre Yae, une jeune fille qui cherche à rejoindre la vallée de l’arbre-monde, persuadée que celle-ci a été épargnée par les sables et que le bourgeon de la vie existe encore là-bas. Sahara décide alors de la suivre dans son périple. Parviendront-ils jusqu’à l’arbre-monde ?

Mon avis

On se retrouve aujourd’hui pour une première incursion dans le catalogue de Nobi-Nobi. Catalogue que j’ai mis du temps à découvrir mais avec une orientation plutôt jeunesse, nul doute que je vais refaire mon retard. Pour ce premier contact je démarre donc avec Sahara le samouraï aux fleurs. Un manga prépublié dans le shonen jump Giga en 2016, avec une parution bimestrielle et 4 chapitres au compteur, le manga a connu une publication en un volume relié cette même année. Côté France, c’est donc la filiale jeunesse des éditions Pika qui nous a proposé ce titre en 2021.

Mais de quoi ça parle? Sahara le samouraï aux fleurs nous plonge d’un univers dévasté par une terrible guerre passée. Depuis, le désert à pris possession de la quasi totalité du globe, la verdure semble incapable de reprendre sa place, comme si la Terre était finalement morte. Des villes restent bien présentes mais hors de question de se rendre de l’une à l’autre à pied, la manœuvre est beaucoup trop dangereuse, de mystérieuses machines guerrières attaquant quiconque tente de traverser ces étendues arides. Au milieu de tout ça Sahara, un guerrier affublé d’une arme aussi étrange qu’efficace va rencontrer Yae, une jeune fille qui se balade avec un véritable trésor : une fleur. Son but atteindre la vallée de l’arbre monde, persuadée que la nature s’y épanouie encore ! Il n’en faut pas plus à Sahara pour accompagner la jeune fille dans son périple !

Voilà un postulat de départ fort attrayant, ce côté récit écologique et débilité de l’être humain me parle bien d’emblée. Et quand on lit ça, difficile de ne pas penser très fort à Nausicaa de la vallée du vent. Car là aussi il était question de guerre et de planète meurtrie (empoisonnée dans le cas de Nausicaa) et où certains essaient de vivre dans ce triste monde et pourquoi pas sauver la Terre. Et si vous avez l’habitude de me lire vous commencez à savoir que ce genre de lecture c’est clairement mon truc.

Et avec le manga de Shibata, j’ai passé un bon moment. Le récit est fluide, très prenant et le format one shot nous propose de fait une aventure sans réels temps morts. On traverse le désert en quelques pages avec ce qu’il faut de combats contre des machines titanesques ! De quoi se régaler avec quelques scènes d’actions et de belles planches, le tout permettant aussi d’en apprendre plus sur Sahara et sur son arme qui change de forme, chaque forme rappelant le nom d’une plante. Un écho à la nature disparue et qui recouvre les corps des titans mécaniques vaincus de verdure et de fleurs que le monde n’avait pas vu depuis bien longtemps.

Le titre propose comme bien souvent avec ce genre de récit une réflexion sur la place que l’humain laisse au machine d’une part et que se passerait il si finalement celles ci finissaient par prendre le pas sur nos choix. Et bien évidemment, sur la guerre et la bêtise humaine, et le pourquoi nous en sommes arrivés là dans ce manga, montre toute la folie des hommes et des egos démesurés.

Sahara, le samouraï aux fleurs fut une très bonne lecture mais format oblige on se retrouve avec quelques passages expédiés et c’est dommage car le titre est très sympa et j’aurai apprécié pouvoir savourer cette traversée du désert qui nous était présentée comme dangereuse et compliqué même pour un guerrier aguerri comme Sahara. Mais malgré tout le titre se tient parfaitement dans ce format et malgré mon souhait de voir le titre plus développé on ne reste pas sur sa faim pour autant.

Sans être exceptionnel d’un point de vue graphique, le résultat est très propre et certaines planches étaient vraiment belles et le dynamisme des phases de combats bien maîtrisé. J’ai beaucoup aimé les croquis de certains titans qu’on trouve entre les chapitres. Du côté de l’édition, le résultat est propre, du côté du format comme de l’impression pas de bavure, de quoi profiter pleinement de son manga !

Pour une première tentative du côté de chez Nobi-Nobi, c’est une excellente expérience que ce one shot. Ayant vraiment apprécié le récit forcément quelques chapitres supplémentaires m’auraient bien plu mais pour autant je ne ressors pas frustré de ma lecture comme on peut l’être parfois avec ce format. Si les récits à consonance écologiques vous plaisent vous devriez apprécier cette lecture et bien évidemment collection Nobi-Nobi le titre est accessible à un jeune public, ne creusant pas trop les côtés sombres de l’humain par exemple, mais reste totalement plaisant pour un public adulte.

Ayako de Osamu Tezuka

Fiche

  • Titre : Ayako
  • Auteur : Osamu TEZUKA
  • Editeur : Delcourt Tonkam
  • Date de publication française : 20 juin 2018 (pour cette nouvelle éditon)
  • Type : Seinen
  • Genre : Social / Historique
  • Nb de volumes parus : 1

Résumé

L’immédiat après-guerre au Japon. L’occupant américain impose ses volontés au vaincu exsangue dans un but « démocratique ». Les effets de la réforme agraire se font sentir jusque dans la région reculée du nord de Tokyo, Yodoyama, où la famille de grands propriétaires Tengé faisait la loi jusque-là. Jiro Tengé, prisonnier de guerre tout juste rapatrié, est devenu un agent secret au service des forces américaines. Il retrouve une famille dont les liens se sont singulièrement dénaturés. Maudite par sa naissance, sa « sœur », la petite Ayako, sera le jouet du destin.

Mon avis

On se retrouve une nouvelle fois pour parler du Dieu du manga au travers d’une de ces oeuvres. Et aujourd’hui nous allons nous intéresser à Ayako, un manga prépublié entre 1972 et 1973 dans les pages de la revue Big Comic. Initialement publié chez nous en 3 volumes par les éditions Delcourt en 2003, c’est en 2018 que le titre revient chez nous en intégrale au sein de la nouvelle collection du même éditeur pour commémorer les 90 ans de la naissance du mangaka.

Comme bien souvent Tezuka traite de la guerre, et c’est ici le point de départ de l’histoire, la deuxième guerre mondiale terminée, entendez par là le conflit en lui même, le jeune Jiro Tengé retrouve enfin sa patrie. Mais pour survivre à cet enfer celui ci n’a eu d’autres choix que de devenir un agent pour le compte des américains, qui occupent désormais le Japon. Jiro va pouvoir retrouver sa famille et faire la connaissance de sa petite soeur : la petite Ayako. Il découvrira assez vite le secret derrière la naissance d’Ayako et toutes les horreurs de sa famille. Son retour signera-t-il l’anéantissement de sa famille?

Avec Ayako, on se retrouve encore une fois avec une oeuvre à ne pas mettre entre de jeunes mains, mettant en scène une famille dysfonctionnelle ou plutôt carrément malsaine. Car Tezuka aborde ici la naissance d’un enfant issu d’un viol car on parle dans certains synopsis de relation incestueuse, mais je parlerai plutôt d’un viol pour ma part, puisque Ayako est l’enfant du père de Jiro et de sa belle soeur. Vértiable monstre, le patriarche de la famille use de sa toute puissance pourtant vacillante pour avoir tout ce qu’il désire allant ainsi jusqu’à la femme de son propre fils. Et on apprendra au fil des pages qu’il n’en est pas à son coup d’essai. Mais Tezuka ira encore plus loin, mettant quasiment tous les membres de cette famille du côté des personnes malsaines, car si le père est le plus abjecte de tous que penser de son fils qui accepte de lui offrir sa femme quand il le souhaite en échange d’un héritage qui se réduit comme peau de chagrin? De cette famille qui décide de tuer ou à minima enfermer à vie une enfant pour dissimuler l’horreur derrière sa naissance? Et encore bien d’autres choses… Bref ici le mangaka va clairement assez loin dans les situations malsaines.

Au delà de ça, Ayako est aussi une chronique sociale, mettant en scène une famille patriarcale d’un autre temps où tous les membres de la famille proches ou éloignés sont assujettis aux décisions du chef de famille, cherchant tous à s’attirer ses faveurs. La famille Tengé est aussi le symbole d’une époque révolue, cette famille au glorieux passé et qui s’enorgueillit toujours des nombreuses terres lui appartenant se voit petit à petit au sortir de la guerre déposséder de ses hectares, et ce n’est ici pas une fiction mais bien ce qui s’est passé à l’époque que Tezuka met en images. L’impact de l’occupant américain sur le pays est mis en avant au travers des manigances dans lesquelles trempe Jiro avec son statut d’agent secret. Si on pense en premier lieu à l’impact culturel que cela a pu avoir, les américains ayant poussé leur culture et tenté d’occulter celle du peuple japonais pendant ces années là, c’est ici à des intrigues politiques que nous avons affaire.

Il met aussi en avant la place de la femme dans cette société rurale japonaise d’après guerre, qui n’a jamais son mot à dire. Si Ayako et Naoko font à mon sens figure d’exception en montrant une vraie force de caractère, le reste des personnages féminins ne sont là que pour subir la volonté des hommes et les servir docilement. Que ce soit la femme du chef de famille qui ne dit rien devant les agissements de son mari qui durent depuis des années ou Sué qui a obéit à son odieux mari et qui laisse sa fille subir toutes ces atrocités. Mais Naoko (la soeur de Jiro), elle sera plus forte que le reste de sa famille et que la plupart des hommes en parlant franchement à Sué par exemple et disant tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Et comment ne pas parler de la force de caractère d’Ayako, qui arrivera à survivre à tous ce qu’a pu lui faire subir sa « famille ». Et tout comme la plupart des personnages féminins soumis à leur mari, on y retrouve aussi un questionnement et une « soumission » à la destiné qu’aborde un moment Shiro le jeune frère de Jiro. Une sorte de fatalité qui conforte les membres de cette famille dans leurs déviances sous couvert d’un cercle qu’ils ne peuvent briser et dont ils sont prisonniers, répétant (et ne pouvant faire autrement selon eux) les schémas qu’ils connaissent aussi abjectes soient-ils. Le destin est un petit malin et finalement jouera un des plus beaux tours qu’il avait en réserve pour clore cette histoire.

On pourrait assez aisément découper l’oeuvre en deux parties. Une première très centrée sur Ayako et sur la descente aux enfers de la famille Tengé. Une deuxième partie dont Jiro devient pour moi le personnage central et où l’on tourne plus autour de l’intrigue politique en démêlant les différents lien qui unissent Jiro et différents politiciens. Tezuka ne manquera pas de boucler la boucle en revenant à certains évènements du début qui nous entrainerons jusque la conclusion de cette fresque tragique. Et si on parle de conclusion, il faut noter que cette nouvelle édition regroupe les 2 fins du manga, celle d’origine et celle que le mangaka a écrite pour la publication en volume relié.

Pour l’édition je ne m’attarderai pas trop dessus car on est sur la même chose que les autres titres de cette collection prestige, papier de qualité, grand format avec couverture rigide, préface et une galerie des personnages faisant le lien entre réalité et fiction. Rajoutez à cela les deux fins et un volume de plus de 700 pages, même si le prix de 30€ peut rebuter certains il est largement en phase avec l’objet et ce qu’il contient.

Ayako est un récit fort et totalement prenant de la première à la dernière page. Tezuka nous livre un manga que je trouve très complet, un instantanée d’une époque lointaine mêlant le drame à l’Histoire, et où la fiction se mélange habillement à la réalité. La tragédie en premier lieu de la petite Ayako puis la déchéance inévitable de cette famille toxique sur plusieurs années en font pour moi un des récits de Tezuka les plus durs lu jusqu’à présent nous laissant mariner dans une atmosphère malsaine. Encore une fois un titre à ne pas mettre entre toutes les mains, mais à découvrir pour les autres!

MW de Osamu Tezuka

Fiche

  • Titre : MW
  • Auteur : Osamu TEZUKA
  • Editeur : Delcourt Tonkam
  • Date de publication française : 16 janvier 2019 (pour cette nouvelle éditon)
  • Type : Seinen
  • Genre : Suspense / SF
  • Nb de volumes parus : 1

Résumé

Michio Yuki est un homme complexe et étrange. Employé de banque modèle le jour, la vérité est toute autre la nuit. D’étranges pulsions meurtrières le poussent à commettre les crimes les plus odieux. Après chaque crime, il effectue le même rituel et va se confesser auprès du prêtre catholique Garai. Il semble qu’un lien particulier unisse cet homme de foi à l’envoûtant et équivoque Yuki. D’autant que, troublante coïncidence, toutes les victimes de Yuki semblent appartenir au même cercle d’influence. Quel mystère cela cache-t-il en réalité ? Quelle est la nature de la relation entre Yuki et Garai ? Et qu’est-ce que le “MW” ?

Mon avis

Aujourd’hui on part pour un nouvel article autour d’Osamu Tezuka. Après avoir, depuis le début du Osamu Tezuka Challenge, lu des œuvres se situant plutôt dans la première partie je repars dans les œuvres plus sombres de sa « fin » de carrière. MW est un manga prépublié entre 76 et 78 dans les pages du Big Comic, arrivé en France via Delcourt/Tonkam en 2004 dans une édition en 3 volumes et réédité en 2019 dans la magnifique collection lancée pour les 90 ans de l’auteur.

MW c’est l’histoire de Yuki et Garai, deux hommes liés par une sombre histoire dont personne ne semble avoir entendu parler. Yuki est un homme complexe aux multiples talents et personnalités. Véritable gendre parfait en journée, il se mue en tueur sans merci la nuit. Assouvit-il une pulsion incontrôlable ou bien est ce que tout cela fait partie d’un plan à plus grande échelle? Difficile de croire à un manque de contrôle de la part de cet homme qui semble si intelligent et calculateur. Il n’hésite pas à confier ses méfaits au père Garai, prêtre sont il se sert pour échapper à la police profitant du secret de la confession pour prendre celui ci en « otage ». Yuki joue aussi de ses charmes avec le prêtre et nous montre que leur relation va au delà de la simple confession. Assez rapidement un retour dans le passé des deux personnages nous en dira plus sur le secret qui les uni et donc les motivations de Yuki.

Après avoir enchainé quelques lectures « Tezukienne » plutôt destinées à un jeune public et des oeuvres beaucoup plus jeune dans sa carrière, c’est tout d’abord un choc visuel que j’ai eu en démarrant le titre. Alors oui la première oeuvre que j’ai lu de Tezuka ce fut L’histoire des 3 Adolf et on est ici sur un trait du même acabit mais avec les lectures des derniers moi je m’étais habitué au trait plus « Disney » de ces premières oeuvres. Et c’est maintenant que j’ai un peu plus de recul sur le mangaka que je me rends compte de son talent. Sans parler du volume de planches et donc du rythme effréné qu’il a tenu sur l’ensemble de sa carrière, c’est une évolution graphique assez hallucinante à laquelle on peut assister grâce à ces différentes oeuvres.

Autre grosse différence, la noirceur du récit. Si dans ses « oeuvres de jeunesse », Tezuka aborde malgré tout des thématiques fortes et que les titres peuvent être abordés différemment par un enfant et un adulte, le mangaka ne fait plus de sous entendu dans les mangas de sa deuxième partie de carrière. Le ton est dur, sombre, les thématiques le sont tout autant. Si on commence à connaitre son goût pour aborder la guerre et ses dégâts collatéraux, ici il s’attaque à des sujets beaucoup plus tabous en abordant la sexualité des prêtres qui est encore un sujet sensible aujourd’hui. Et il ajoute aussi le traitement de l’homosexualité et il faut le rappeler nous sommes au moment de la sortie dans les années 70, je trouve ça fort de la part de Tezuka d’en parler et de le mettre vraiment en avant au coeur de son récit.

Le mangaka n’en délaisse pas pour autant, comme je le disais, le thème de la guerre qui semble être une constante de ses oeuvres (en tout cas de celles que j’ai lu). On se retrouve ici avec une sombre histoire autour d’une substance dangereuse que les Etats Unis auraient stocké sur le sol japonais. Une histoire passée sous silence avec le concours de quelques personnalités japonaises.

Je m’interroge aussi de plus en plus du rapport du mangaka aux agressions sexuelles car c’est quelque chose que l’on retrouve plus que régulièrement dans ces oeuvres. Je pense par exemple à La femme insecte, Ayako, L’histoire des 3 Adolf, où le mangaka met ce genre d’actes en image. Si dans la femme insecte ou l’histoire des 3 Adolf, il a choisi de représenter ça de manière subjective (serpent dévorant la femme), ici ou dans Ayako il choisi de rester dans la réalité de la scène. Et j’avoue que voir cela revenir aussi souvent dans ces oeuvres m’interroge de plus en plus.

En conclusion, MW est clairement un titre fort de l’auteur, si je lui préfère d’autres titres malgré tout il reste un indispensable de Tezuka ne serait ce que par les sujets et thématiques qu’il aborde. Le personnage de Yuki aussi intelligent que fou nous transporte dans un univers de violence et de manipulation. Victime a une époque, il se mut bourreau et frappera quiconque se mettra sur son chemin. Vous l’aurez compris ce ne sera pas à mettre entre de jeunes mains mais pour les autres foncez!

Tripeace de Maru Tomoyuki

Fiche

  • Titre : Tripeace
  • Auteur : Maru Tomoyuki
  • Editeur : Ki-oon
  • Date de publication française : 26 Aout 2010
  • Type : Shonen
  • Genre : Action / Aventure
  • Nb de volumes parus : 11

Résumé

Nana, jeune garçon atteint d’amnésie aigüe, a oublié jusqu’à son véritable nom. Après avoir assisté impuissant à la mort injuste de trois enfants au cours d’un de ses voyages, il se jure d’éradiquer toute guerre de la surface de la terre. Il rejoint alors Tripeace, un petit groupe d’activistes dont les membres utilisent toutes sortes d’armes et ne reculent devant rien, pas même la violence, pour pacifier le monde. Mais très vite, le tout nouveau matricule 102 078 de Tripeace se retrouve face à un dilemme : peut-on protéger la paix à n’importe quel prix ?

Mon avis

Il est des lectures qui nous marquent lors de nos découvertes mais qu’en est-il quand nous nous replongeons dedans quelques années plus tard? Dans le cas d’aujourd’hui, j’avais découvert et suivi la série Tripeace dès sa sortie en 2010 puis interrompu ma lecture au tome 7 lors de ma rentrée dans la vie active. C’est récemment que j’ai pu mettre la main sur les volumes restant de la série, étant donné que 2 tomes étaient en rupture il m’a fallu attendre la bonne occasion pour pouvoir compléter la série sans que les spéculateurs (encore et toujours eux…) s’en mettent pleins les poches. Mais trêve de bavardages, rentrons dans le vif du sujet!

Aujourd’hui je vous emmène à la découverte de Tripeace, un manga de Maru Tomoyuki, prépublié dans le Monthly Shonen Gangan entre 2008 et 2011, et paru chez nous grâce aux éditions Ki-oon en 2010. Première et unique série du mangaka à ce jour, celui-ci est surtout connu pour avoir travaillé en tant qu’assistant d’Atsushi Ohkubo sur Soul Eater, ce qui se ressent je trouve dans le style et le ton de l’histoire.

On commence donc ce périple au côté de Nana, un jeune garçon qui a complétement perdu la mémoire. Une hyper amnésie qui lui a fait oublier vraiment tout même les choses les plus basiques. Il va se retrouver confronté très rapidement aux horreurs de la guerre que mène l’empire de Xyece contre le reste du monde. C’est au milieu de cette bataille qu’il va voir mourir 3 enfants avec lesquels il venait de se lier d’amitié. Complétement impuissant face aux machines de Xyece, il va leur de cette bataille découvrir l’existence d’une organisation qui souhaite éradiquer la guerre dans le monde : Tripeace. Une organisation qu’il va rejoindre pour lui aussi tenter de stopper ce mal qui gangrène le monde.

On ne va pas se mentir le titre ne révolutionne pas le monde du manga mais a à mon sens des arguments à faire valoir, le plus fort à mes yeux et le principe de l’organisation Tripeace. Tripeace regroupe des personnes de tous horizons et de toutes les nations qui souhaitent en finir avec ça, entrainant d’ailleurs quelques réactions et dialogue un peu basique dont personnellement je me serais passé. Bah oui bien sûr qu’on peut être né dans une nation horrible mais vouloir autre chose que tuer des millions de personnes, bref ça reste basique. Mais par contre Tripeace fonctionne par escouade. Escouade sous la responsabilité d’un chef et d’un second, mais pour pouvoir accéder au rang de chef il faut trouver sa troisième loi de médiation. Kesako? Tout simplement comment le chef souhaite éradiquer la guerre et à partir de là on va pouvoir se poser la question de jusqu’où peut-on aller pour stopper les guerres?

Car comme le dit le proverbe l’enfer est pavé de bonnes intentions et est ce qu’en éradiquant la guerre en usant de la violence cela ne nous place-t-il pas au final du mauvais côté? Et c’est un des points forts de la série pour moi, à quel moment bascule-t-on du mauvais côté, est ce que les bonnes intentions justifient toutes nos actions? Et dès la rencontre avec l’escouade Ira dont le chef Belial a choisi la violence comme troisième loi de médiation, jugeant que seul la violence arrêtera la violence, et à partir de là on va pouvoir s’interroger sur la portée d’un tel choix. Belial dont Tripeace cautionne son comportement puisqu’il suit aussi les deux premières lois que sont l’amour et la paix, mais qui finira par abandonner ces préceptes cédant pleinement à la violence pour atteindre son objectif, l’organisation décidant à ce moment-là de tout faire pour l’arrêter.

Et finalement user de la violence pour stopper la violence c’est la meilleure méthode pour rentrer dans un cycle de haine sans fin, ce que le titre laissera rapidement entre voir avec des flashbacks de certains personnages. Le titre poussant même à des cas encore plus dingue comme l’apparition de la sixième escouade déchue, Jack Free, une escouade avec des types vraiment flippant qui ne feront pas de distinctions lors d’un conflit, décidant de tuer dans les deux camps pour éradiquer le conflit. Oui là c’est radical, mais bien vite mis de côté ce que j’ai clairement trouvé dommage… Mais le titre contre balance aussi en présentant un peuple totalement pacifiste mais qui lui non plus ne sera pas épargné par la guerre au final. Nous montrant ainsi que la réponse à tout ça n’est pas simple, que l’équilibre à trouver est compliqué et que la frontière entre bons sentiments et actes répréhensibles peut être très mince.

Si le premier des deux arcs de la série était prenant, jonglant entre action et humour, me rappelant ainsi pourquoi j’avais apprécié la série. On ne peut pas en dire autant du second arc que j’ai découvert récemment malheureusement. Le premier arc avait introduit pas mal de personnage et je pense que beaucoup aurait mérité d’être beaucoup plus développé que ça.

Parlons par exemple de Nana le personnage principal, un jeune homme dont on sait très peu de choses. Aucun souvenir, pas de capacités particulière de prime abord, on va le suivre dans sa quête pour éradiquer la guerre. Si la présence d’une énorme cicatrice sur son corps nous donne la cause de son amnésie, c’est lorsque celle si sera rouverte lors d’un affrontement que Nana fera ressurgir une force phénoménale qu’il avait cachée en lui. Et on en sera pas plus sur son passé avant le 2eme arc. C’est un personnage assez drôle avec une tendance plus que prononcée au travestissement, en faisant même sa troisième loi de médiation et surtout l’occasion pour le mangaka de nous gratifier de quelques scènes assez drôles ou de quoi titiller les hormones des ados. Et si on en apprend plus sur Nana dans le deuxième arc il y avait clairement beaucoup mieux à faire et tout cela aurait mérité un développement un peu plus long. Idem pour la nation dont il est issu. A croire que le mangaka a dû vite finir son manga et nous fournir juste de quoi répondre aux questions mais sans plus.

Pourtant malgré tout ça, Tripeace reste un bon moment de lecture. Que ce soit par son humour ou par des phases de combats dynamiques, je ne peux pas dire que je me sois ennuyé ou que je n’ai pas apprécié, bien au contraire, d’où cette sensation de frustration. Et ne serait-ce que pour le premier arc qui représente 8 tomes sur les 11 que comporte la série, ça vaut le coup d’être lu. La deuxième partie est clairement dispensable même si elle a le mérite malgré tout de nous révéler comment Nana en est arrivé là, sorti de ça ce n’est clairement pas fou et c’est bien dommage… Et si certains ont la réponse quant à l’arrêt forcé ou pas de la série à l’époque je suis preneur… N’ayant plus revu le mangaka depuis, je me dis qu’il y a des chances que tout cela se soit arrêté assez brutalement malheureusement.

Cette série aura soufflé le chaud et le froid, et c’est clairement dommage, car si finalement le titre n’est qu’un énième Nekketsu sur le marché, il avait de quoi devenir un peu mieux que ça. Mais malgré tout le titre m’aura fait passer de bons moments et je relirai certainement le premier arc de cette aventure de temps en temps!

Wombs de Yumiko Shirai

C’est dans le cadre de la volonté éditoriale d’Akata de remettre sur le devant de la scène de la science fiction féminine que Wombs arrive donc par chez nous, elle rejoint donc entre autres le siège des exilées ou nos temps contraires. Et pour une première du côté de ces œuvres c’est une bonne claque que m’a mise le titre avec ce premier volume.

Fiche

  • Titre : Wombs
  • Autrice : Yumiko Shirai
  • Editeur : Akata
  • Date de publication française : 11 mars 2021
  • Type : Seinen
  • Genre : SF / Guerre
  • Nb de volumes parus : 1 (En cours de parution)

Résumé

Quelque part, dans l’univers… Les first se sont installés sur la planète Jasperia et l’ont terraformée. Ils ont cru pouvoir y vivre en paix. Mais à l’arrivée des second, une terrible guerre est enclenchée.

Vingt ans plus tard, et tandis que le conflit n’a pas faibli, Mana Oga est choisie pour intégrer une section spéciale de l’armée : « les Forces spéciales de transfert ». Cette unité d’élite est composée exclusivement de femmes, dont les utérus servent d’incubateurs à des fœtus parasites. Ces dernières développent alors une capacité unique, la téléportation, conférant à leur armée un avantage stratégique notable. Arrachée à son quotidien, Oga va devoir s’entraîner, se former puis prendre part à une guerre dont elle ignore les véritables enjeux et implications…

Mon avis

Prépublié en 2010 dans les pages du Ikki Comics, Wombs est la deuxième série de la mangaka Yumiko Shirai. Après son œuvre auto-produite Tenkensai qui lui avait permis de décrocher un prix d’encouragement lors du Japan Arts Media Festival, c’est avec Wombs qu’elle va accéder au titre suprême avec le grand prix Nihon SF. Un prix japonais récompensant les meilleures œuvres de SF, et par œuvre on entend bien sûr pas que du manga. D’ailleurs peu de mangas ont reçu cette distinction, on y trouve seulement Domu de Katsuhiro Otomo et Barbara Ikai de Moto Hagio, preuve du talent de la mangaka.

C’est dans le cadre de la volonté éditoriale d’Akata de remettre sur le devant de la scène de la science fiction féminine que Wombs arrive donc par chez nous, elle rejoint donc entre autres le siège des exilées ou nos temps contraires. Et pour une première du côté de ces œuvres c’est une bonne claque que m’a mise le titre avec ce premier volume.

Dans Wombs nous allons suivre l’incorporation de jeunes recrues au sein d’une unité spéciale. Cette unité est constituée uniquement de femme auxquelles on va implanter un fœtus parasitaire qui, à terme, va leur permettre de développer la capacité de se téléporter. Une unité d’élite qui pourrait permettre de prendre un avantage stratégique conséquent dans la guerre qui fait rage depuis des années contre les Second.

Et si le pitch de départ est clair on se rend très vite compte à la lecture qu’il y a énormément de zones d’ombres. Zones d’ombres pour le lecteur mais aussi pour les protagonistes, ce qui colle je trouve parfaitement bien avec ce contexte de guerre. Des on dit permettant de manipuler possiblement le peuple et les soldats dans un conflit dont ils ne maitrisent ni les tenants ni les aboutissants. Et on avance au même rythme que la jeune recrue Mana Oga, qui n’a pas plus d’information que nous. Qui sont et à quoi ressemblent les Nibas dont elles vont porter le fœtus? Elles ne le savent pas et nous non plus. Ce traitement nous permettant de suivre l’histoire directement au travers de la jeune militaire et étant aussi dépourvu d’informations qu’elle nous immerge assez rapidement dans le titre.

Du côté de la guerre, on est tout aussi perdu. Qui sont les Second? Des humains? Des humanoïdes? La seule chose que l’on voit ce sont des robots sur 4 pattes. Le peuple semble même étrangement vivre dans une certaine paix assez loin de la fureur et de l’ampleur du conflit qu’on nous évoque. Un conflit nécessitant l’incorporation de recrues féminines de plus en plus jeune pour garnir les rangs de l’unité de téléportation.

On se retrouve avec la classique incorporation à la dure, menée tambour battant par la sergente Almare. Mais comme bien souvent cela cache aussi un côté plutôt protecteur envers les nouvelles recrues. Un personnage qui a un sacré vécu au sein de cette unité étant déjà dans son cinquième cycle, une force de la nature! On voit déjà arriver le sujet de l’utilisation d’êtres humains et de leur corps à des fins militaires, en l’occurrence les femmes, et sans trop de scrupule. Que ce soit dans les quelques bribes d’informations sur la création de l’unité de téléportation ou lors de l’évocation de la suite des opérations à mener contre les Second, il y a fort à parier que les femmes de cette unité d’élite ne soit pas grand chose de plus qu’un sacrifice de plus au service de la guerre. Et même si certaines semblent vouloir se dresser contre ce système, en la personne de la sergente Almare.

Si ce premier tome a été une excellente lecture, il reste à voir ce que la suite va donner pour se faire un avis plus précis sur cette série. Un tome qui nous jette tête la première dans cette guerre sans aucune préparation. Et j’entends par là pas seulement les nombreuses zones d’ombres mais aussi que je me suis clairement senti perdu par moment, peinant à comprendre ce qui se passe réellement (en particulier lors des premières pages). Le côté SF me parle en tout cas énormément, tout comme les thématiques abordées dans ce premier volume et qui, je l’espère, seront développées par la suite. L’ambiance est parfaitement maitrisée par la mangaka qui nous plonge dans ce monde sans filet et sans nous donner plus d’informations que celles en possession de la protagoniste. Une immersion réussie donc dans un univers qui a encore beaucoup de choses à nous livrer. Une lecture je trouve bienvenue pour les fans de SF!